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CUBA, LES CLUBS & CABARETS QUI ONT FAIT L'HISTOIRE.
TROPICANA
LA HAVANE 72 Avenida Truffin, Marianao |
Le TROPICANA ouvre ses portes dans un site luxuriant à l'écart de la ville pour la toute dernière nuit de 1939. En quelques jours le nom du cabaret passe de BEAU SITE à TROPICALS NIGHT CLUB puis à TROPICANA dès lors que le saxophoniste et chef d'orchestre Alfredo BRITO fait entendre sa composition du même nom. |
L'orchestre de Alfredo Brito au Tropicana.
Mais très rapidement la direction du TROPICANA entreprend de concurencer les deux grands cabarets de la capitale le MONTMARTRE et le SANS SOUCI. Elle engage le Ballet Russe de Monte Carlo et monte avec ses artistes une chorégraphie de Sergio Orta, Julio Richards et Serge Lifar qui prendra vie sous la forme du célèbre show Congo Pantera qui propose un éventail de grands noms de la musique cubaine, "Chano" POZO, "Bola de Nieve" , Rita MONTANER... et des centaines de danseurs et danseuses. Gilberto VALDÉS crée la musique et l'orchestre de BRITO l'interprète.. "Bola" et Rita restent plusieurs années comme attraction principale du show de minuit.
Rita et Bola lors du show de medianoche. |
Dès le début des années quarante Martin Fox entre à la direction du cabaret et entreprend de le transformer pour en faire un endroit luxueux destiné à accueillir la meilleure clientèle cubaine et étrangère. L'architecte Max Borges exploite la luxuriance tropicale du lieu, redonne une nouvelle vie au Salón Bajo las Estrellas tout en plein air et conçoit le Salón Arcos de Cristal avec ses voûtes de verre. |
Et dix ans après l'inauguration du TROPICANA la célèbre Ballerina est installée au centre d'une pièce d'eau. |
Mais le monde est en guerre et la situation devient difficile . Le nombre de visiteurs baisse de manière insoutenable et beaucoup de cabarets ferment. Parallèlement, pour lutter contre la corruption, le gouvernement décide en 1942 de fermer les tables de jeux. De surcroît l'ouragan Safir Simpson de 1944 cause d'importantes destructions y compris dans le parc du TROPICANA. Tant bien que mal le cabaret survit et les propriétaires chargent Armando ROMEU Jr de former un nouvel orchestre. ROMEU rassemble la plupart des musiciens qu'il dirigeait au SANS SOUCI -sans les trompettes dans un premier temps- et forme ce qui reste le plus grand orchestre jamais organisé à Cuba. Pour la danse c'est le Conjunto de Ernesto GRENET qui oeuvre à partir de 1947 et jusqu'en 1950 et le chanteur Orlando VALLEJO est invité à chanter avec le "CONJUNTO COLONIAL" en 1948.
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Cette même année 1948 Correa fait venir d'Espagne l'orchestre "Gran Casino" qui prend le nom de "Los CHAVALES de ESPAÑA" et commence une longue carrière cubaine. Des formations étrangères sont engagées pour les spectacles comme Woody Herman en 1950; Cab Calloway... Xavier CUGAT est invité à se produire au TROPICANA mais les intempéries ont raison de toutes ses présentations. Gonzalo ROIG présente sa troupe de danseuses, les "Mamboletas" et leur star naissante Emilia "La China " VILLAMÍL. |
Ana Gloria y Rolando, duo vedette du Tropicana pendant plusieurs années. |
L'année suivante de nouvelles productions et de nouvelles vedettes font leur apparition: Celeste MENDOZA dans El Yoyo, Paulina ÁLVAREZ dans Patio Andaluz et dans Carnaval Carioca, production pour laquelle le TROPICANA appelle également Celia CRUZ. L'orchestre de Sénen SUAREZ est également engagé pour Patio Andaluz. La danseuse Leonela GONZÁLEZ est la grande figure du cabaret en 1954, année au cours de laquelle elle apparaît dans plusieurs shows. Parmi les autres étoiles il faut mentionner le Cuarteto de Orlando de la ROSA. Leonela, "La China" VILLAMÍL, Olga GUILLOT, Miguelito VALDÉS et "Los RUFINOS" sont les principaux artisans du succès de la production Canciones de Ayer. Celia Cruz prête pour le show. Photographie Collection V. Gold Levi. |
Fox entame une nouvelle série de transformations du TROPICANA au milieu de la décennie, principalement dans le casino et, pour attirer les joueurs, donne encore davantage de fastes aux shows. Les campagnes publicitaires sont grandioses, les revues Diario de la Marina, Show... ne parlent que des spectacles du cabaret. Fox met en service un avion superconstellation La Havane Miami et retour, totalement transformé en un cabaret rappelant le salon Arcos de Cristal, pour que les touristes américains commencent dès leur départ à profiter du TROPICANA. ANA GLORIA y ROLANDO et un petit orchestre assurent le spectacle et l'ambiance. Quant aux shows du cabaret, ils s'appuient sur le travail de Armando ROMEU et de ses musiciens. Pour le spectacle Circo, ce dernier arrange des thèmes comme "Black Magic", "Caravan", "Tea for two", "Lover", "Stardust", "In the Mood"... Pour Luna de Tropicana il utilise "Stranger in the Paradis", "Rhapsodie in Blue", "Moonlight Serenade"... |
Anna Gloria à bord du Super G Constellation. |
Fort de ces innovations le TROPICANA et "Rodney" partent vers de nouveaux sommets notamment dans trois productions exceptionnelles de l'année 1955. Pour Karabali et Embrujo en la Noche sont invités le "Cuarteto Las d'AIDA", Merceditas VALDÉS, Leonela GONZÁLEZ, Orlando de la ROSA et son cuarteto, "D'RUFF" -nouveau nom des "RUFINOS"... La bailarina Leonela González. Autre ensemble de shows de haut niveau: Bahiondo et Flamingo Rapsody avec Olga GUILLOT; la vedette brésilienne Carmen Miranda, Felo BERGAZA, Juan Bruno TERRAZA, Nelson PINEDO... Enfin Hello Broadway et Madonnas de Capri terminent l'année avec Estela, Ana Gloria, Rolando, "Las d'AIDA'"...
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Les shows ne sont pas la seule activité du cabaret. Le grand orchestre ou des orchestres invités sont au programme du spectacle et animent la partie dansante. La formation de Armando ROMEU reste l'orchestre attitré du cabaret et elle n'est remplacée que lorsque surgit une tournée. Les plus importants musiciens cubains passent par cet orchestre. La plupart d'entre-eux sont des jazzmen et terminent les soirées par de grandes descargas. Au TROPICANA le répertoire comprend des thèmes cubains la plupart du temps arrangés par Bebo VALDÉS mais aussi des compositions de Count Basie, Duke Ellington, Flechter Henderson, Stan Kenton...
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En 1956 Noches del Trópico réunit Xiomara ALFARO, "Las d'AIDA", Dandy CRAWFORD, les vedettes habituelles Ana Gloria, Rolando, Leonela... et de nombreux modelos. Ramón VELOZ, Celina GONZÁLEZ et REUTILIO, Carlos FAXAS et son cuarteto. "Las Hermanas LAGO" les rejoignent pour Seis Lindas Cubanas et Paulina ÁLVAREZ est de retour dans En Tragos. Benny MORÉ fait son apparition à l'affiche du TROPICANA intervenant au cours des trois shows de la nuit. Merceditas, Celia et les chekeré dans Tambo, 1957. |
"Los RIVERO", le "Cuarteto LLOPIS", "Los GUARACHEROS de ORIENTE" font partie des formations invitées au TROPICANA cette année-là. |
Nat King Cole revient l'année suivante.. Il se déplace avec son trio; John Collins, guitare; Richie Harvest, contrebasse et Lee Young, drum et se met lui même au piano. Il chante mais conquiert le public du TROPICANA par ses interprétations au piano de "How high the Moon", "Lover come back to Me". Nat se fait accompagner par la formation de ROMEU pour plusieurs thèmes dont "Blue gardenia". Le succès obtenu auprès des musiciens cubains eux-mêmes conduit ceux-ci à organiser une impressionante descarga chez un particulier. Ils invitent des jazzmen jouant dans d'autres cabarets et clubs, les musiciens de Nat, ainsi que Sarah Vaughan et ses musiciens, Jimmy Jones, piano; Roy Haynes, drum; Richard Davis, contrebasse; hôtes au même moment du SANS SOUCI. Nat King Cole au Tropicana en 1958. |
Le TROPICANA reste aussi un endroit où règnent les jeux d'argent et l'affichage ne cesse de le rappeler. |
Après la troisième visite de Nat King Cole débute un nouveau show fastueux, Diosas de Carne encore appelé Las diosas del Olimpo avec une abondance de modelos et la participation de Berta DUPUY, des "Hermanas LAGO" et du "Cuarteto Los RIVERO".
Rumbo al Waldorf, sur des compositions de Ernesto LECUONA, termine l'année avec Berta DUPUY, "Los GUARACHEROS de ORIENTE" tandis qu'au bar du casino c'est la formation de Felipe DULZAIDES qui a été invitée. |
Le 31 décembre 1958, comme chaque année, tout le TROPICANA se prépare à se rendre à la propriété de Batista pour présenter ses voeux au président. Mais quelques heures plus tôt un avion s'est fait entendre dans le ciel du cabaret. Batista s'enfuyait devant l'avancée des barbudos et de la Révolution. Quelques personnalités et membres du gouvernements quittent précipitamment le cabaret qui termine ses spectacles. Contrairement à d'autres casinos et salles de jeux le TROPICANA ne subit aucune dégradation, protégé par le fait que le commandant Cienfuegos établit à cet endroit son campement provisoire. La grève générale du 1° janvier conduit à la fermeture du TROPICANA qui toutefois ouvre de nouveau ses portes quelques jours plus tard et présente de nouveau Rumbo al Waldorf. Fox, comprenant immédiatement les enjeux, décide d'offrir la recette pour la reconstruction des maisons détruites dans les combats. |
"Rodney" quant à lui continue ses créations et monte le spectacle Bumki Bun et Tropicana Vodevil avec la participation de Berta DUPUY, "Los RIVERO"...
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Au début de 1960 Tropicana alrededor del mundo remplace les autres shows et le spectacle est complété par Pachanga en Tropicana, première revue qui, pour cause de maladie, échappe au chorégraphe "Rodney" au bénéfice de Armando Suez. L'année est marquée par une situation qui se complique entre le régime révolutionnaire et Martin Fox qui a pratiquement perdu la direction effective de son cabaret. Il s'exile au cours de l'année 1960, laissant le TROPICANA entre les mains du nouveau pouvoir qui dans de nouvelles conditions continue de faire fonctionner le lieu. Les jeux d'argents sont interdits. La partie casino ferme et deviendra au cours de la décennie le restaurant Los Jardines; la cafeteria est remplacée par un autre restaurant, La Fuente. Dès 1961 c'est le parking qui donne naissance au Salón Mambí qui peut accueillir près de dix mille spectateurs. |
Le grand évènement de 1'année 1961 dans un TROPICANA accessible désormais aux bourses populaires reste la production Carnaval en Tropicana avec une pléiade de vedettes dont Rosita FORNÉS, Merceditas VALDÉS, Emilia VILLAMÍL, Armando BIANCHI...et comme par le passé une multitude de modelos et danseuses.
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En fin d'année le TROPICANA lance Cuba Sí avec Esther BORJA, Emilia VILLAMÍL, des chorégraphies de Suez et des arrangements de ROMEU. ............ |
La nouvelle production de 1962, Leyenda Antillana inclus également "Los MODERNISTAS" et Yumbambé, Paulina ÁLVAREZ, Ela CALVO, Felo BERGAZA.... Au Salón Panorámico ce sont Rolo MARTÍNEZ et le combo de Samuel TELLEZ qui tiennent l'affiche. "Los TROPICUBAS" prennent la suite tandis que Los Arcos de Cristal reçoivent le troisième concert de música moderna avec une formation dirigée par Leonardo TIMOR et les voix de Moraima SECADA, Doris de la TORRE, Dandy CRAWFORD... ainsi que les percussions de " Los PAPINES". Après quelques semaines de flottement le TROPICANA propose un nouveau show, Senseribó, avec Caridad CUERVO, Paulina ÁLVAREZ, Pello el AFROKÁN ... Dans le courant de l'année 1963 naît le programme Los Martes de Tropicana et c'est la voix de Lino BORGES qui débute tandis que Miguel de GONZALO occupe à son tour le Panorámico. |
Los Martes de Tropicana et les prestations au Salón Panorámico ont un grand succès et se poursuivent en 1964 avec la participation des "Hermanos BERMUDEZ", de "Las CAPELLAS", le "Cuarteto del REY", les "Hermanas VALDIVIA", "Los BUCANEROS", los "Hermanos BRAVO", Gloria ARREDONDO acompagnée de Oswaldo ESTIVILL, Esther BORJA .
La production Tentaciones débute au milieu de l'année avec en particulier Celeste MENDOZA et l'année suivante les plus grandes voix de l'île se retrouvent dans Carnavaleando: Pello, Elena BURKE, José Antonio MENDÉZ, "Los MODERNISTAS", Moraima SECADA, Celeste MENDOZA, "Los ZAFIROS", Pacho ALONSO... |
La plupart des artistes sont reconduits en 1965, de même que le show, pour laisser place dès les premiers jours de l'année suivante à Tu música en Tropicana dont Meme SOLIS et "Los MEMES" figurent parmi des vedettes. "Las d'AIDA", Omara PORTUONDO, Felo BERGAZA et la grande formation de ROMEU sont les principaux acteurs du succès de Buenos Días Init en 1966 tandis que, provenant de Holguín, l'orchestre "Hermanos AVILÉS" se présente au Salón Mambí qui accueille également pour des bailables la "Orquesta RIVERSIDE", "Las ESTRELLAS de CHOCOLATE", la "GLORIA MATANCERA" , "RUMBAVANA", "CHAPOTTÍN y sus ESTRELLAS" , Pello el AFROKÁN, la "ARAGÓN", Roberto FAZ, Neno GONZÁLEZ .... |
Si le Salón Mambí continue de présenter les grandes formations cubaines, les shows commencent à stagner et Buenos Días Init reste à l'affiche encore toute l'année 1967 pour n'être remplacé que l'année suivante par Son y Ritmo en Tropicana, spectacle dans lequel triomphent de nouveau "Las d'AIDA", Merceditas VALDÉS, Felo BERGAZA... "Elio REVÉ y su CHANGÜI 68", la "SUBLIME", le "CONJUNTO MODELO" mènent les bailables. Cette année-là Armando ROMEU quitte l'orchestre du cabaret après vingt trois ans de succès.
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Les formations musicales plus que les shows sont désormais les attractions principales du TROPICANA même si en 1972 apparaît une nouvelle grande production Los Romanos eran así dirigée par Joaquín M. CONDAL dont l'une des curiosités est constituée par "Los TAMBORES de BEJUCAL" et par l'incorporation de lions au spectacle. Le guitariste Rey MONTESINOS assure plusieurs arrangements pour cette production.
CONDAL crée une école de danse du Tropicana et, suivant en cela la tradition initiée par RODNEY qui avait présenté le spectacle Noche Cubana au Waldorf Astoria lors d'une assemblée de l'Association de Turisme International, il multiplie les sortie de ses shows hors de Cuba, à Monte Carlo, Broadway et un peu partout dans le monde. Il remodèle aussi le cabaret dans le but que le spectateur se trouve dans le coeur même du show. En 1984 c'est Rey MONTESINOS qui dirige pendant cinq ans l'orchestre accompagnant les shows. Autour de lui on retrouve parmi les musiciens Salvador "Macho" ALMIRAL, Giraldo PILOTO, drum; Pedro GONZÁLEZ, bongó et timbales; Alfredo MONTES de OCA, tumbadora; "Masca Chicle", "El Guajiro" MIRABAL, Enemelio JIMÉNEZ, trompettes...
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à suivre.....
© Patrick Dalmace
Discographie
* " Tropicana. Un Paraiso bajo las Estrellas", compilation. Discmedi 220.